29 Sep

2015, année des excès

Certes la liquidité est faible et requiert donc d’être confiant à long terme sur ses actifs (comme sur son passif d’ailleurs…), mais les niveaux atteints sur certaines obligations, notamment parmi le ‘haut rendement’ à 1-3 ans, deviennent actuellement très élevés et mériteront d’y porter attention : entre crise de refinancement assurée et opportunités d’achat majeures, la situation devient parfois binaire et l’exemple de OI Brazil est caractéristique (25% de rendement à échéance 02/2016…)
Sur la semaine l’indice Iboxx Euro Overall réalise une performance de -0.08%, tiré à la hausse par les souverains, seuls à profiter de la politique de la BCE ces temps-ci, à la grande satisfaction de nos politiques probablement, grandement aidés par les taux nuls pour boucler des budgets ‘à peu près’ à l’équilibre, ce qui laisse perplexe sur l’avenir de ces budgets, une fois la perfusion BCE terminée… elle ne s’arrêtera donc pas de sitôt… L’Iboxx Euro Corporate réalise une performance de -0.45%, l’indice € High yield de -1.11%.
 
Parmi les grands évènements de la semaine on ne pourra rédiger cet hebdo sans parler de l’affaire Volkswagen. Nous ne reviendrons pas sur le détail technique et ‘managérial’ du scandale, largement commenté par la presse et divers analystes mais en tirerons quelques conséquences sur les raisonnements d’investissements à venir :
 
1- Il faut noter que l’action et les obligations Volkswagen étaient à peu près dans tous les indices ISR (Investissement Socialement Responsable) et donc également dans les fonds équivalents, ce qui pose deux problèmes, jusqu’à présent soigneusement évités par les agences de notation extra financière ou les gérants ISR :
 
Peut-on accepter qu’un gérant s’appuie sur des indices purement quantitatifs et dont les données sont fournies par les entreprises elles-mêmes pour justifier de l’impact social de son investissement ? L’ISR ne doit-il pas être en priorité une affaire de conviction et d’éthique plus qu’une affaire d’agences, de notes, d’indices, autant de domaines dont on connaît depuis longtemps les excès et qui peuvent facilement faciliter les pires abus.
 
On notera d’ailleurs que les grandes entreprises sont quasiment les seules à pouvoir financer leur label ISR qui est bien souvent plus un argument marketing qu’une réelle conviction d’un dirigeant, on l’a vu cette semaine avec VW mais on ne doit pas croire qu’il s’agisse d’un cas isolé ; il est probable que de nombreux laboratoires pharmaceutiques, industriels agroalimentaires, fabricants de produits chimiques, autant d’industries largement représentées dans l’ISR, agissent de la même manière mais l’aient jusqu’à présent mieux caché…
 
 Et comment des agences ou des analystes ISR, souvent très peu nombreux, peu financés et dont les conclusions sont rarement indispensables dans les banques ou les fonds d’investissement, pourraient parvenir à détecter, grâce à quelques rapports fournis par les entreprises elles-mêmes, une anomalie dans un processus industriel complexe, international et souvent peu transparent (‘secret industriel’ oblige…) ?
 
Peut ont vraiment accepter le principe du ‘Best in Class’ qui autorise à peu près tous les secteurs et choisit le soi-disant ‘meilleur’ ? Ceci pousse à investir dans des industries qui polluent, provoquent des maladies, favorisent l’obésité des enfants, etc… mais compensent par quelques artifices pour satisfaire des agences qu’ils rémunèrent souvent pour être notés…
 
Dernier point concernant l’ISR, peut-on vraiment accepter une méthodologie financière par principe basée sur des valeurs morales tandis que ces valeurs peuvent elles-mêmes être différentes en fonction des pays par exemple, voire même au cours du temps. Peut-on critiquer une entreprise au Bengladesh ou en Chine dont la seule motivation est la création de valeur au prix d’une pollution excessive quand on connaît l’histoire de l’Europe pour parvenir à notre stade de développement ?
 
2- Les corporates investment-grade étaient et sont encore en moyenne trop chers pour rémunérer ou amortir un risque majeur comme celui que nous venons d’observer chez VW. Les entreprises BBB à 10 ans empruntent actuellement à 1.8% de rendement, soit un spread d’environ 1.3% par rapport au taux ‘sans risque’ allemand. Sur ces niveaux, pour perdre une année entière de portage par une moins-value dans sa valorisation (soit 1.8% de moins-value) il faut que le spread ou les taux augmentent de 25 points de base soit 0.25%… Suite au scandale, les obligations à 10 ans VW se sont écartées d’environ 100 points de base soit 4 ans de portage… Les facteurs de risque sont aujourd’hui nombreux, tant d’un point de vue ‘taux’ que d’un point de vue ‘prime de crédit’ et il devient nécessaire de ne plus voir la rémunération d’une obligation en relatif mais en absolu. Par exemple, en deçà de 3.5%/4% à 10 ans, nous considérons que le rapport rendement/risques est trop faible quel que soit l’émetteur et quel que soit le spread par rapport au taux sans risque. N’oublions pas que le taux sans risque est largement manipulé par les banques centrales et les Etats, donc ne l’utilisons pas comme référence !!
Pour rester dans les aveux de mensonges, nous signalerons les déclarations du Vice Président de la BCE qui a déclaré cette semaine que la menace d’expulsion de la Grèce de la Zone Euro « n'a jamais été lancée pour de vrai parce que ce ne serait pas légal. » La menace avait pourtant été largement utilisée et reprise par diverses parties prenantes comme Wolfgang Schauble qui avait même présenté le 11 juillet, un plan d’exclusion temporaire de la Grèce pour 5 ans, plan qui a poussé Monsieur Tsipras dans ses retranchements et l’a forcé à accepter la reddition. Avec ces nouveaux éléments, heureusement pour Monsieur Tsipras arrivés après les élections de septembre, on peut conclure que :
– Le gouvernement grec s’est fait berner par les institutions européennes
– L’affaire n’est pas finie car les Grecs en savent maintenant un peu plus qu’en juillet
– Finalement, peut-être que Monsieur Varoufakis avait raison…
Enfin dernier point de la semaine, les élections en Catalogne : comme nous l’évoquions en début de trimestre, la victoire des séparatistes Catalans représente un risque significatif pour l’Espagne, une sécession réussie pouvant montrer le chemin à d’autres régions riches et frontalières notamment le Pays Basque ou la Navarre. Depuis quelques semaines vu les niveaux de taux de l’Etat et des corporates espagnols (mettant évidemment de côté les Abengoa et consors…) nous conseillons de céder l’ensemble de ses positions sur le pays qui pourrait connaître des pics d’incertitude, de volatilité et encore une fois d’illiquidité et provoquer des moins-values significatives, pour une rémunération actuelle somme toute faible.

 

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